Malvina
La petite mouche de la
malice ©
Il était une fois, à Istanbul, un petit garçon appelé Sadi-Boudou qui était tant gâté par ses parents qu'il en était devenu insupportable.
Les pauvres parents étaient désolés. Ils s'empressaient d'obéir à tous ses caprices pour essayer de l'adoucir et d'éviter ses crises de colère. Ils ne pouvaient pas comprendre comment leur fils chéri avait pu devenir aussi méchant.
Je t'assure, dit un jour maman Zobéïda, cela n'est pas naturel.
Que faire ? Dit papa el-achar. Et si nous le gâtions davantage ?
Ce n'est guère possible, il n'y a pas un seul de ses désirs qui ne soit aussitôt satisfait. Il y a là quelque chose de mystérieux. Si nous allions consulter Fati-Fata?
Tu as peut-être raison, répondit El-Achar ; menons le chez Fati-Fata, le célèbre guérisseur; il lui fera certainement absorber quelque breuvage qui aura sur sa santé les plus heureux effet.
Le lendemain, les parents tenant par la main leur petit garçon arrivent chez le guérisseur. Un serviteur en culottes bouffantes entre, et les introduit auprès de Fati-Fata. D'un geste, Fati-Fata fit approcher Sadi-Boudou.
Mais quand il voulut lui faire tirer la langue, quel ne fut pas son étonnement de voir que le petit garçon, au lieu d'obéir, tapait du pied et se roulait par terre.
Papa El-Achar et maman Zobéïda eurent beau supplier Sadi-Boudou de se laisser examiner, lui promettre des gâteaux, du nougat et des dattes fourrées, ils ne purent rien obtenir de Sadi-Boudou qui trépignait de rage et se débattait dès que Fati-Fata s'approchait.
Le guérisseur avait tout de suite constaté que Sadi-Boudou était un petit garçon très bien portant, et très développé à tout point de vue. C'est pourquoi il n'insista pas pour l'examiner, mais au contraire l'envoya jouer dans le jardin. Puis il interrogea les parents. Il leur fit raconter toute leur triste histoire. Il les écouta avec la plus grande attention. Il avait très vite compris.
Illustre maître, dit alors maman Zobéïda très inquiète, allez-vous pouvoir sauver notre petit Sadi-Boudou?
Mais certainement ô Zobéïda!
Est-il dangereusement atteint ? Dit le père désespéré.
Mais pas du tout. El-Achar!
Alors comment se fait-il qu'ils soient si méchant ?
Fati-Fata lentement leva l'index et prononça : " c'est à cause de Malvina ! "
Malvina ? Dirent les parents très étonnés, et qui est donc cette personne? Nous n'en avons jamais entendu parler?
Malvina, dit le guérisseur, c'est la mouche de la malice. Elle est si petite et si fine que nul ne peut la voir. Elle se pose de préférence sur la joue de l'enfant et dès qu'elle le pique, il devient méchant.
Voilà qui est incroyable ! Et que faut-il faire alors ?
L'homme plein de sagesse sourit.
Pour que l'enfant redevienne sage, il faut tout de suite écraser la mouche sur sa joue.
Avec quoi donc faut-t-il l'écraser? Demanda la mère effrayée.
Avec la main tout simplement, en prenant un peu d'élan, répondit Fati-Fata.
Tandis que les braves gens ramenaient chez eux leur petit garçon, ils ne pouvaient s'empêcher de s'étonner. Ainsi le guérisseur ne leur avait recommandé ni poudre, ni pommade, ni onguent, ni potion magique. Mais seulement d'écraser une toute petite mouche invisible sur la joue de leur enfant ! Ils étaient bien inquiets et pleins de doutes.
Puis voilà qu'à peine rentrés, ils entendirent dans la chambre de Sadi-Boudou un bruit terrible.
Si je veux les mettre est je les mettrai ! criait Boudou.
Trésor du ciel, suppliait Baha-Baha la vieille nourrice de Sadi-Boudou, trésor du ciel ne mets pas tes babouche neuves en ce jour où il nous vient cette pluie torrentielle et bienfaisante!
Baha-Baha , je mettrai mes babouches neuves que tu le veuilles ou non !
Boudou, Boudou! Mon petit vizir en miel, suppliait la vieille nourrice qui sentait la colère du gamin monter, soit raisonnable.
Si tu ne me laisse pas les mettre, je les jetterai dans l'huile bouillante hurla Boudou.
Il tapa du pied si fort que toute la maison en trembla. Papa El-Achar et maman Zobéïda se regardèrent.
C'est Malvina qui le pique murmura papa El-Achar, il faut agir vite.
Alors sans hésiter, il appliqua sa main sur la joue de Sadi-Boudou. Les effets furent instantanés. Étonné, Sadi-Boudou regarda son père, s'arrêta de trépigner et s'en alla sans rien dire jouer gentiment dans un coin. Les bonnes gens étaient stupéfaits !
Pendant trois jours Sadi-Boudou fut d'une sagesse exemplaire. Il semblait ne pas très bien comprendre ce qui lui était arrivé. Mais voilà que le 4ème jour, il eut l'idée de vouloir couper une peau de tigre qui recouvrait le divan de maman Zobéïda.
Il voulait en faire une outre qu'il remplirai d'eau. Sa maman lui demanda avec beaucoup de douceur de renoncer à ce projet. Alors Sadi-Boudou tout devint tout rouge, se roula par terre, puis saisissant un brûle-parfum auquel sa maman tenait beaucoup, il le jeta violemment contre le mur. Et le brûle-parfum fut brisé en 1000 morceaux.
Alors sans hésiter, maman Zobéïda suivi le conseil de Fati-Fata et appliqua sa main sur la joue de Sadi-Boudou. La mouche fut sûrement tuée sur le coup car Boudou regarda sa mère, se mit à pleurer et lui demanda pardon. Il devint sage comme une image. Très vite, les mouches comprirent qu'il ne fallait plus se poser sur Sadi-Boudou. Il ne se mit donc plus jamais en colère et devint le plus gentil de tous les petits garçons d’Istanbul. Il ne demandait plus jamais rien, était toujours content de tout, et riait du matin jusqu’au soir.
C'est depuis ce temps-là, m'a-t-on affirmé, que l'on a si bien fait la chasse à Malvina, la mouche de la malice, que l'on a pour ainsi dire complètement détruit cette vilaine race.
Pr 19:18; Eph 6:4 |
Étude
et commentaires du Livre Sacré |